Sciences

Physarum polycephalum : une seule cellule, mais capable d’apprendre

« C’est la première fois que l’on prouve qu’un organisme unicellulaire est capable d’apprentissage », affirme le coauteur d’une étude qui a été publiée ce mercredi par Proceedings of the Royal Society B. Personnage phare de cette expérience : le Physarum polycephalum, lointain cousin du champignon et doté d’une seule cellule.

Le Physarum polycephalum, ce blob à une cellule, mais plein d’extensions

Qui est donc ce « Blob » comme aiment à l’appeler les cherchent en référence au film de science-fiction : bien gluant, jaunâtre, il est apparu sur Terre 500 millions d’années avant l’espèce humaine, vit dans les sous-bois des régions tempérées et se nourrit de bactéries, de champignons et d’avoine.

Même s’il n’est composé que d’une seule cellule, de nombreux noyaux façonnent son organisme. Il est capable de recouvrir plusieurs mètres carrés s’il le veut, en utilisant ses extensions ou pseudopodes.

Quant à sa mobilité, elle est relativement lente puisque sa vitesse moyenne est de 5 centimètres par heure. En général, ses déplacements ont comme motif exclusif la recherche de la nourriture. Et c’est ce motif qui a été exploité dans l’expérience qui a enlevé le voile sur ses capacités d’apprentissage.

Le Physarum polycephalum à la poursuite des flocons d’avoine

L’amour du « Blob » pour l’avoine a été utilisé pour observer ses techniques de recherche de nourriture et surtout ses aptitudes à s’adapter aux obstacles.

Explication. Pendant neuf jours, les porteurs de l’étude ont disposé trois groupes différents de Physarum polycephalum de manière à ce qu’ils soient séparés par un obstacle du nutriment convoité : les flocons d’avoine. Ils ont créé ces obstacles sous forme de ponts différents constitués de substances amères, mais nullement dangereuses pour les blobs.

Le premier groupe a dû faire face à de la quinine, le deuxième à de la caféine et le troisième à un pont ne comportant aucune substance.

Trois ponts différents, tous conquis par le Blob

Le processus d’apprentissage du Physarum a été observé de la manière suivante : leurs premières tentatives se sont limitées à l’utilisation d’une seule très fine extension pour atteindre l’avoine tout en évitant au maximum le contact avec la substance inconnue.

Petit-à-petit, ils ont compris que lesdites substances sont sans danger et ont osé traverser le pont de plus en plus vite, réduisant le temps nécessaire qui était de plusieurs heures au début. Après six jours, leur comportement et rapidité étaient similaires à ceux du groupe témoin dont le pont était vierge.

Ce phénomène observé illustre ce que les scientifiques nomment « habituation » : « un processus d’apprentissage simple qui consiste à s’habituer à un stimulus quand on le rencontre fréquemment », selon Audrey Dussutour, chercheuse CNRS (Centre national de la recherche scientifique) à l’Université Toulouse III Paul Sabatier.

L’habituation s’applique aux organismes sans neurones aussi !

Ce processus est observable chez tous les animaux ainsi que chez les êtres humains bien sûr. Il se caractérise toutefois par l’oubli lorsque le stimulus disparait pendant une certaine durée et par sa spécificité quant à un stimulus donné.

Ainsi, les Physarum qui se sont adaptés à la quinine avaient un comportement tout aussi méfiant qu’au début après deux jours sans contact avec cette substance (oubli). Le même comportement de méfiance a été observé lorsque ce groupe a été confronté à caféine, et ce même après qu’il se soit adapté à la première substance (spécificité).

Expérience à tester sur des organismes encore plus simples

Après avoir prouvé sa capacité à trouver le meilleur chemin dans un labyrinthe ou à optimiser sa nutrition, le Blob a bien assis sa réputation en tant qu’organisme capable d’apprendre. Cette expérience va sûrement lancer plus d’études sur la capacité d’autres organismes encore plus simples que le Physarum polycephalum, comme les bactéries, à s’habituer et apprendre par l’expérience. [VIDÉO]

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Un commentaire

  1. C’est vraiment surprenant qu’un champignon peut apprendre à ignorer un obstacle de caféine sur son chemin, alors qu’il est unicellulaire et dépourvu de système nerveux.

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