Sam Altman affirme ne pas avoir connu une seule nuit vraiment réparatrice depuis l’arrivée de ChatGPT dans le grand public, fin 2022. Derrière la trajectoire fulgurante du service, le patron d’OpenAI décrit une responsabilité permanente, faite d’arbitrages techniques minuscules, mais capables de peser sur des usages à l’échelle mondiale.
L’essentiel
- Sam Altman dit ne pas avoir bien dormi depuis le lancement public de ChatGPT fin 2022.
- Il relie cet épuisement à la charge de piloter un outil d’IA utilisé massivement, sous surveillance constante.
- Ses inquiétudes portent surtout sur les décisions de calibrage, parfois infimes, qui peuvent changer la manière dont le modèle répond et influence ses utilisateurs.
- Cette confession remet au premier plan une question simple, mais lourde, celle de la gouvernance et du contrôle d’une technologie déjà intégrée au quotidien.
Le récit tranche avec l’imagerie habituelle de la tech, celle des fondateurs inaltérables et des lancements célébrés comme des victoires nettes. Altman parle plutôt d’un travail qui ne s’arrête jamais, parce qu’un assistant conversationnel n’est pas un produit figé, mais un système vivant, ajusté en continu. Quand l’outil devient un réflexe pour écrire, apprendre ou décider, l’erreur n’est plus une anecdote, elle prend immédiatement une dimension sociale.
Une veille permanente depuis 2022
La formule est brutale, et elle a été reprise telle quelle par plusieurs médias, qui la replacent dans un échange public où Altman endosse explicitement le rôle de visage et de responsable. Il ne décrit pas seulement des nuits courtes à cause du travail, il insiste sur l’impossibilité de déconnecter, comme si le produit restait allumé dans sa tête, même quand l’écran s’éteint.
Ce type de pression n’a rien d’abstrait, car une IA conversationnelle, dès qu’elle est adoptée à grande échelle, fabrique des situations impossibles à anticiper entièrement. Une réponse maladroite peut devenir virale, une faille peut être exploitée, un mauvais comportement peut se répéter à grande vitesse. Dans ce contexte, la “veille” n’est pas un slogan, c’est une contrainte structurelle.
Le poids des « micro-décisions »
Ce qui revient dans ses explications, ce n’est pas d’abord la grande peur spectaculaire, celle que la fiction adore mettre en scène. Sa hantise est plus terre à terre, presque administrative, parce qu’elle tient à l’addition de décisions minuscules, prises pour corriger un comportement, réduire un abus, limiter une dérive, ou affiner une tonalité.
Ces choix, souvent perçus comme des réglages techniques, touchent pourtant à la norme. Modifier une consigne, renforcer une restriction, rendre une réponse plus prudente ou plus directive, ce sont des gestes invisibles pour l’utilisateur, mais susceptibles d’influencer la manière dont il écrit, apprend, argumente, ou demande conseil. C’est précisément cette asymétrie, l’ampleur des effets face à la petitesse des leviers, qui nourrit l’anxiété qu’il décrit.
Un impact à l’échelle de l’humanité
ChatGPT a été ouvert au public le 30 novembre 2022, et OpenAI l’a présenté à l’époque comme un “aperçu de recherche”, selon l’annonce de lancement publiée par l’entreprise, avec une promesse implicite, apprendre vite grâce au retour d’usage. Depuis, l’outil a quitté le statut de curiosité et s’est glissé dans des gestes ordinaires, de la recherche d’information à l’aide à la rédaction, en passant par l’assistance au code ou l’explication pédagogique.
À cette échelle, le risque n’est pas seulement l’erreur spectaculaire, mais la répétition de petites erreurs. Une hallucination occasionnelle, une réponse biaisée, une simplification trop confiante, même si elles restent minoritaires, peuvent produire un volume d’incidents qui compte, simplement parce que l’usage est massif. Et c’est là que la responsabilité change de nature, on ne parle plus d’un logiciel qui bugue, mais d’un système qui dialogue, oriente, persuade parfois, et se trompe aussi.
La gestion du risque existentiel
Cette confession arrive dans un moment où la régulation de l’IA reste discutée partout, avec une tension constante entre accélération industrielle et prudence publique. Dire sa fatigue peut humaniser la scène, mais cela rappelle surtout que l’arbitrage ne repose pas uniquement sur des principes, il repose aussi sur des personnes, leurs limites, et la qualité de leur vigilance.
La question qui se glisse alors, presque malgré elle, concerne la solidité de la gouvernance. Quand un dirigeant explique qu’il vit sous pression depuis des années, l’enjeu n’est pas de juger son endurance, mais de se demander comment une organisation s’assure que les décisions critiques ne dépendent pas d’un seul rythme, ni d’une seule voix. Dans un extrait d’entretien plus ancien, Altman évoquait déjà les inquiétudes liées à l’orientation de ces systèmes, et l’aveu actuel donne à ces mots une densité nouvelle, moins théorique, plus physique.
FAQ
Il affirme ne pas avoir bien dormi une seule nuit depuis la mise à disposition publique de ChatGPT à la fin de novembre 2022. Dans sa bouche, ce repère n’est pas un effet de style, il marque le moment où la responsabilité est passée d’un laboratoire à un usage mondial.
Il met surtout en avant l’effet disproportionné de réglages minuscules, ceux qui modifient la manière dont le modèle répond, filtre, refuse ou reformule. Autrement dit, il redoute moins le grand scénario que l’accumulation de décisions techniques capables d’influencer des comportements réels.
Pas directement, car elle vise plutôt à montrer le poids qu’il associe à cette fonction et à ces choix. Elle peut toutefois alimenter une interrogation légitime sur la gouvernance, la répartition des responsabilités et la robustesse des processus, surtout quand les décisions ont des effets bien au-delà d’OpenAI.


