Anthropic lance Claude 4, une nouvelle génération d’intelligence artificielle focalisée sur l’efficacité technique. Loin des effets de manche, le modèle vise les usages métiers, avec une précision qui parle aux ingénieurs.
Ils n’ont pas levé la voix. Ni bombardé les réseaux de démos spectaculaires. Anthropic, la start-up californienne fondée par d’anciens d’OpenAI, continue d’avancer à contre-courant. Pas de conférence tapageuse, pas d’images générées à la volée. Juste une promesse tenue : Claude 4 est là pour travailler, pas pour impressionner.
Derrière ce nom un peu impersonnel, deux variantes : Opus et Sonnet. La première est la plus puissante, la seconde la plus rentable. Toutes deux partagent une même ambition, celle d’incarner une IA qui comprend mieux qu’elle n’éblouit, qui agit avant de parler. Claude 4 a été pensé pour répondre aux attentes concrètes des développeurs, des data scientists, des équipes qui construisent — plutôt que celles qui présentent.
Le message est clair. Claude ne veut pas remplacer un humain dans un jeu de société, ni commenter les tendances. Ce qu’il fait, il le fait à fond : coder, analyser, automatiser. Pas de multimodalité tape-à-l’œil. Pas de génération d’images. À l’heure où tout le monde veut briller avec des IA artistes, Anthropic creuse l’ornière technique. Et pour beaucoup d’ingénieurs, c’est exactement ce qu’ils attendaient.
La démonstration a eu lieu en creux, au cœur du Vivatech. Dario Amodei, le patron de la boîte, n’a pas cherché à épater la galerie. Il a simplement annoncé que Claude Opus 4 devenait leur meilleur modèle à ce jour. Et dans la foulée, il a glissé que cette version était déjà à l’œuvre dans certains outils connus — dont le nouvel agent de développement de GitHub. Un signal fort, pour un outil pensé comme un levier invisible.
Ce n’est pas la première fois que Claude cherche à s’infiltrer dans les flux de travail plutôt que dans les fils Twitter. Dès l’an dernier, Anthropic avait surpris avec sa fonctionnalité « Computer use », qui permet à l’IA d’utiliser un ordinateur comme un humain : cliquer, taper, faire défiler une page. Claude 4 prolonge cette capacité, avec un sens du détail qui frôle parfois l’obsession.
Côté performances, les chiffres parlent. Un contexte de 200 000 tokens, jusqu’à 64 000 tokens de sortie pour Sonnet, le double pour Opus. Une capacité à maintenir une logique sur des sessions longues. Et surtout, une efficacité remarquable sur les bancs de test pour le code, notamment SWE-bench et TAU-bench. À l’usage, Claude 4 sait corriger ses erreurs, réfléchir à voix haute, planifier des refactorings complexes. Pour les équipes produit, c’est une avancée précieuse.
Ce réalisme technologique tranche avec les ambitions plus généralistes des ChatGPT, Gemini ou Meta AI. Là où ces modèles misent sur la polyvalence, Claude choisit la spécialisation. C’est une IA qui assume son orientation : pensée pour les professionnels, faite pour les intégrer dans des cycles de production. Une IA qui ne cherche pas à parler de tout, mais à bien faire ce qu’elle connaît.
Il y a dans cette stratégie une forme de radicalité. Mais elle répond aussi à une attente. Celle de ne pas perdre de temps avec un modèle trop bavard ou trop dispersé. Celle d’avoir un outil stable, documenté, intégrable dans un backend ou un pipeline de données. Claude 4 ne sera peut-être jamais une célébrité virale. Mais il pourrait bien devenir un pilier invisible de nombreuses architectures logicielles.
Reste une question. Pourquoi ce choix de discrétion ? Pourquoi ce ton mesuré alors que le marché bruisse d’annonces permanentes ? C’est peut-être là qu’Anthropic joue sa meilleure carte. En cultivant une image sobre, presque artisanale, l’entreprise construit un lien de confiance avec les milieux techniques. Elle ne vend pas du rêve, elle propose des outils. Et c’est parfois plus rassurant que la magie.
Il faudra du temps pour que Claude s’impose hors du cercle des ingénieurs. Mais dans ce monde d’outils, où le mot-clé vaut plus qu’un slogan, il semble déjà avoir trouvé sa place. Une IA qui ne cherche pas la lumière, mais qui éclaire les process.