Quand l’amitié devient un service

Claire Morel
Rédigé par Claire Morel
Mark Zuckerberg présente Meta AI with Voice lors d’une conférence, en évoquant les amis virtuels et l’IA conversationnelle.
Zuckerberg propose les chatbots Meta comme alliés face à l’isolement social (Reuters)

Mark Zuckerberg affirme que, dans un futur proche, la majorité de nos amis seront des intelligences artificielles. Cette annonce soulève une question brûlante : que devient le lien humain, lorsque l’algorithme prétend aimer mieux que l’autre ?

Il y a, dans certaines promesses technologiques, une douceur étrange. Ce n’est pas un grand fracas, ni une rupture visible. Juste une glissade. Cette semaine, Mark Zuckerberg a confié que nos futurs compagnons de route pourraient bien être des intelligences artificielles. Des « amis IA », disponibles à tout moment, capables d’écoute, d’humour, d’empathie simulée.

Dans les coulisses de Meta, cette vision n’est plus une hypothèse. Les chatbots incarnent déjà des figures familières — célébrités, experts, personnalités inventées — destinées à nourrir nos fils de discussion. Ils répondent sans délai, n’interrompent jamais, s’adaptent à nos humeurs. Mais au-delà du gadget, il y a un virage. Une redéfinition lente mais réelle de ce qu’on appelle « relation ».

Ce que propose Zuckerberg, ce n’est pas une substitution frontale. C’est une extension. Un prolongement algorithmique du lien humain, censé lisser ses aspérités, combler ses absences. Comme si les réseaux sociaux cherchaient à réparer, à leur manière, le vide qu’ils ont contribué à creuser. Une solitude connectée, peuplée d’interlocuteurs parfaits.

Reste l’imprévisible. L’inconfort du silence partagé. L’hésitation, la dispute, le doute. Tout ce qui constitue, justement, la texture vivante d’une relation humaine. Peut-on parler d’amitié sans cela ? Peut-on faire confiance à un « lien » qui ne nous met jamais à l’épreuve ?

Les plus jeunes, eux, n’auront peut-être jamais connu autre chose. Une génération qui confondra réconfort et programmation. D’autres y verront une avancée, une aide, un répit. Rien n’est encore tranché. Ce qui est certain, c’est qu’à force de vouloir tout fluidifier, tout simplifier, on risque de ne plus savoir ce que signifie être ensemble, vraiment.

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